Une trentaine d’étudiants – germanophones et francophones – des instituts et facultés de théologie de toute la Suisse se sont rencontrés le 17 mars dernier à la Faculté de théologie de l’Université de Zurich pour une journée œcuménique. Ils ont discuté et échangé sur les questions éthiques actuelles. Leurs points de vue divergent mais en faveur d’une éthique théologique sociale et œcuménique.
Organisée semestriellement pour les étudiants et par les étudiants eux-mêmes dans un des instituts ou facultés de théologie de Suisse (Fribourg, Lucerne, Einsiedeln, Berne, Bâle, Zurich, etc.) cette journée œcuménique vise à établir des contacts permanent entre les étudiants de théologie, indépendamment des sensibilités confessionnelles de leurs universités respectives. Elle leur permet d’aborder le plus rigoureusement possible les questions clés de la théologie dans tous ses domaines: pastorale, dogmatique, morale et éthique.
Ethique et espoir
Cette journée œcuménique interfacultaire s’organise toujours sur un thème d’actualité. Celui de ce printemps a été «éthique et espoir». Après un cours d’éthique, les participants se sont regroupés pour discuter et échanger sur des cas concrets de morale et éthique, dont la récente votation sur les avocats des animaux. Ils ont analysé un récent article du 20 Minuten intitulé «Tierfreunde befreien Hühner aus Güggelifarm» (Des amis des animaux libèrent des poulets d’une ferme) relatant une opération menée par des membres du groupe «Friends of chicken» en Argovie où ils ont fait s’échapper 20’000 poulets afin d’éviter qu’ils ne soient abattus.
Par cette analyse, l’exercice consistait à trouver des arguments pertinents pour justifier théologiquement ou philosophiquement le fait de manger ou non de la viande. Lors de cet exercice de réflexion, les points de vue ont divergé. Les uns ont trouvé que le groupe «Friends of chicken» défendait implicitement le végétalisme alimentaire sur la base d’une interprétation littérale de la Bible en référence, par exemple, à la Genèse où Dieu semble n’avoir autorisé de ne manger que des fruits. D’autres ont affirmé que ni dans la Bible ni ailleurs, si ce n’est seulement dans le culturel, on ne peut trouver d’arguments assez convaincants qui interdisent ou autorisent de manger de la viande.
«Il y a des peuples, comme les Indiens par exemple, qui considèrent la vache comme un animal très sacré et ne peuvent pas manger sa viande pour cette raison. Et il y en a d’autres, comme les Européens, qui trouvent que la vache n’a rien à voir avec le sacré, raison pour laquelle ils mangent aisément sa viande. Tout cela relève du culturel qui ne peut pas être objectivement justifié du point de vue moral,» relève un des participant réfutant l’argument d’un de ses collègues d’Einsiedeln selon lequel, si Dieu dans sa bonté aime infiniment ses créatures, dont les animaux, l’homme ne peut que faire comme lui en respectant leur vie.
Quand les points de vue divergent en bioéthique
Outre cet exercice de réflexion de morale alimentaire, les participants ont aussi abordé la problématique de la bioéthique qui se pose tant du point de vue philosophique que du point de vue théologique. Ils trouvent que les points de vue divergent en matière bioéthique selon les sensibilités confessionnelles et déplorent un manque d’entente sur une éthique théologique sociale qui, surtout dans la pastorale d’accompagnement des malades, devrait dicter une meilleure prise en charge du malade et le respect de la vie humaine.
Pour Lukas Schoenenberger, étudiant en Master à l’Université de Fribourg, cette journée est un pas vers une ouverture à l’autre. «Au cours de cette rencontre interfacultaire, on s’enrichit intellectuellement,» déclare-t-il. «Pouvoir discuter sans se déchirer alors que nous venons des divers horizons avec nos différentes sensibilités théologiques est un signe pour moi, voire un pas vers un œcuménisme plus concret et vivant. On s’édifie donc intellectuellement, spirituellement et on affermit notre foi chrétienne,» ajoute-t-il.
Cette journée de rencontre interfacultaire des étudiants de théologie pose une pierre dans l’approche positive d’une théologie œcuménique axée sur des valeurs morales interconfessionnelles et sur le christianisme ouvert. Mais jusqu’où ces jeunes théologiens porteront-ils l’espoir d’une éthique morale œcuménique? À eux de répondre, par leurs réflexions constantes et constructives.
Texte et photo par Tharcisse Semana