«J’ai envie d’aller vers les étudiants»

Situé à l’entrée de la Grand-Rue à Fribourg, le café Le Tunnel ne paie pas de mine. C’est pourtant le lieu de rencontre privilégié d’une nouvelle génération d’artistes et de musiciens. La patronne Nathalie Bloesch nous fait découvrir l’offre insoupçonnée de ce nouvel Eden culturel.

En face de la vieille Schweizerhalle, dans le dédale des rues grises du quartier du Bourg, se trouve un bistrot sans fenêtres. C’est le café Le Tunnel, dont la vitrine en arcade peut évoquer l’œil d’un cyclope. Quel Ulysse s’aventurerait dans cette obscurité désertée? Les étudiants fréquentent-ils encore ce haut lieu de la vie estudiantine des temps mythiques de l’ancienne patronne Mama Leone, ou l’ont-ils délaissé?

Qu’on ne s’y trompe pas: le Tunnel offre une des scènes les plus actives de la ville. Plus de soixantes événements s’y sont succédés de septembre à décembre 2012. Et rebelotte de janvier à juin 2013. Voilà de quoi décoiffer n’importe quel fêtard et détrôner l’agenda du Centre Fries, pourtant déjà bien fourni en festivals de tous genres. La nouvelle patronne Nathalie Bloesch nous introduit dans cet univers surprenant.

Âgée de 47 ans et domiciliée à Villars-sur-Glâne, rien ne la prédestinait à devenir patronne de café. Titulaire d’une licence de théologie, elle bifurque rapidement vers le journalisme. De 1997 à 2008, elle est active dans le magazine «Hautes Fréquences» sur la 1^ère, avant de s’engager en faveur de l’ONG «Entraide protestante» durant deux ans. Ce n’est qu’en 2010 qu’elle reprend et retape le café Le Tunnel en association avec Rebecca Casutt, développant le concept de café culturel.

L’offre culturel du Tunnel, c’est d’abord des concerts. «Nous présentons des musiques de toutes sortes» explique Nathalie Bloesch, «du baroque, du rock, beaucoup de jazz – le lieu s’y prête bien – et d’autres genres encore». Des soirées slam ont également été organisées et y ont remporté un vif succès. Sans compter les théâtres humoristiques, les one-man-shows, les soirées littéraires dédiées à la poésie, les souper-contes et les expositions temporaires. Et durant les élections, le Tunnel a accueilli des débats politiques.

Ce programme extrêmement diversifié doit permettre de «créer des liens entre les communautés» annonce Nathalie Bloesch. Il doit aussi soutenir les artistes locaux et leur «servir de petite scène». Ainsi, Nathalie Bloesch se dit «émerveillée» de la richesse musicale du canton de Fribourg, qui alimente sans peine les soirées du Tunnel. Constatant que le public ne se lasse pas et en redemande, elle assure que la diversité va se maintenir.

Ce public, Nathalie Bloesch le situe dans une certaine tranche d’âge: «ils ont entre 30 et 60 ans en majorité». Les familles ne sont pas en reste et fréquentent également le café. Qu’en est-il des étudiants? «J’ai envie d’aller vers ce public» indique Nathalie Bloesch. Elle pense pour cela déployer deux axes de séduction: l’offre culturelle exceptionnelle et l’accessibilité des prix. Autre élément : le wifi sera installé dans le bistrot dès janvier. Et Le Tunnel met également plusieurs salles à disposition gratuitement pour l’organisation d’événements. Ainsi, la Fachschaft de littérature française profite déjà de ces locaux pour organiser ses soirées de lecture informelles.

D’ailleurs, pour les étudiants, le café constitue aussi un lieu de travail. Actuellement, cinq étudiantes y font le service. Des volontaires sont recherchés en permanence et la patronne accepte avec plaisir les CV déposés spontanément. Nathalie Bloesch se déclare également ouverte à toute proposition d’événement nouveau : «Je soutiens les start-ups culturelles, j’en suis une moi-même!» s’exclame-t-elle.

Probablement attiré par le succès du café, le landerneau politique débarque lui aussi au Tunnel. Le PDC, le PS et les Verts en ont fait leur point de rencontre occasionnel. Ce qui n’est pas pour déplaire à Nathalie Bloesch: «J’aimerais que le café soit un lieu de débat, j’y tiens» confie-t-elle.

Blaise Fasel

Caféresto-Galerie Le Tunnel