Le canton mise sur la collaboration de deux organismes mandatés et de l’engagement bénévole pour remplir sa mission d’intégration des réfugié·es. Un partage de responsabilité qui semble fonctionner, pour la plupart du temps.

En 2000, elle est écologique, en 2008, économique, aujourd’hui, sanitaire. Assurément, notre époque est rythmée par la crise. L’année 2015 connaît quant à elle la plus importante crise migratoire depuis la 2ème guerre mondiale. Les nombreux conflits au Moyen- Orient sont à l’origine d’un exil massif vers l’Europe. Pour échapper à la guerre, des millions de personnes sont condamnées à fuir. La route est dangereuse, les chances minimes, l’espoir lointain. Face à l’urgence, les pays européens tirent la sonnette d’alarme et ouvrent leurs portes, avec plus ou moins de bonne volonté. Aujourd’hui, 3,7% des requérant·e·s d’asile en Suisse sont pris·e·s en charge par l’État de Fribourg. Comment et par qui cette responsabilité est-elle assumée dans le canton ?

L’ORS, bras droit du canton

Le canton de Fribourg mandate deux organismes pour la prise en charge des réfugié·e·s : l’ORS et Caritas Suisse. Depuis 2008, l’ORS s’engage dans l’intégration des réfugié·e·s et des requérant·e·s d’asile dans une même optique : encadrer, accompagner et intégrer. Leur démarche d’encadrement se déroule en trois phases. Après la prise en charge et l’hébergement dans les foyers, des programmes d’occupation et d’accompagnement social garantissent une intégra- tion adéquate dans la société, sur la voie de l’indépendance. C’est bel et bien la destination espérée : avoir toutes les clés en main pour poursuivre son propre chemin. Le processus peut paraître infantilisant. Mais en réalité, il serait erroné de le connoter négativement, car l’insertion est un voyage comblé d’obstacles et de ce fait il ne s’accomplit pas en cavalier seul. Accueillir des réfugié·e·s implique de les soutenir et de les guider.

Les engagements de Caritas

L’accompagnement des réfugié·e·s ressort aussi de la responsabilité de Caritas. Outre ses différents services d’intégration, l’association assure des projets sous le signe de l’éducation et de la communication. Chaque projet se concentre sur une population particulièrement fragile. Envole-moi favorise l’encadrement des mineur·e·s non accompagné·e·s (MNA) et des jeunes adultes réfugié·e·s. Ensemble s’adresse à la population migrante touchée par des traumatismes. Le service d’interprétariat communautaire et celui de prévention du racisme cultivent de leur côté une compréhension mutuelle, basée sur le respect et l’écoute. D’une perspective sociale, professionnelle, administrative, ou encore juridique, Caritas couvre des besoins essentiels à une intégration réussie de cette population dans le canton.

UNA : refugees meet students

Des prestations restreintes dans l’offre des cours de langues, c’est la constatation sur laquelle UNA à vue le jour. L’association estudiantine se forme en 2016 avec l’ambition d’offrir un accès facilité à l’apprentissage de la langue, en favorisant le lien social et les interactions. Un échange spontané entre étudiant·e·s et réfugié·e·s : c’est le caractère mis en avant par la présidente, Eléonore Zermatten. « UNA se différencie des autres associations dans la mesure où elle est gérée par des étudiant·e·s. Naturellement, les jeunes réfugié·e·s sont plus susceptibles de s’identifier à nous qu’aux éducateur·rice·s professionnel·le·s des centres, parfois moins accessibles et plus formel·le·s ». Aujourd’hui, la palette des langues enseignées s’est élargie, tout comme les projets proposés par l’association. « Certains réfugié·e·s donnent à leur tour des cours d’arabe ou de farsi, la langue persane. Les soupers organisés au Centre Fries leur donnent l’occasion de nous faire découvrir la cuisine de leur pays », explique l’étudiante de 31 ans. Loin d’être unilatérales, ces activités se veulent participatives, en donnant l’occasion aux réfugié·e·s d’organiser eux·elles-mêmes certaines activités, tout en transmettant leur culture.

Le saviez-vous ? LAsi

La loi sur l’asile (LAsi) constitue la base de référence au niveau fédéral en Suisse. Les États doivent se soumettre aux dispositions légales en mettant en place les infrastructures nécessaires à l’accueil des requérant·e·s d’asiles. L’intégration des réfugié·e·s doit passer par des mesures d’accompagnement et d’intégration sociale, financières et professionnelles. La loi stipule entre autres les procédures de demande d’asile et les règles à appliquer dans les centres d’hébergement.

ORS x UNA à demi-mots

Malgré sa bonne volonté, l’association doit encore faire face à des challenges. L’accès aux femmes en fait partie. D’après Eléonore, les femmes réfugiées, souvent mère de famille, peinent à venir aux activités, contrairement aux hommes. La prise en charge des enfants à l’Université reste compliquée, et constitue à l’évidence une entrave à leur participation. Autre bémol : les relations avec l’ORS, responsables des foyers du Bourg et de la Poya. Les cafés-rencontres organisés dans ces locaux ne sont pas possibles sans leur autorisation. Si l’ORS semble preneuse des projets soumis par UNA, leur contribution est de l’ordre du minimum. « La limite entre notre statut d’association indépendante ou de bénévoles pour l’ORS est parfois floue », nous précise la présidente. Lorsqu’on l’interroge sur ses attentes envers l’institution, Eléonore s’explique : « Nous n’attendons rien de leur part… à part un soutien au niveau de la visibilité de nos activités. L’ORS doit faire office de relai : ils doivent encourager les gens à s’intéresser aux activités que l’on met en place pour eux ». Pour le moment, UNA doit rendre des comptes à l’ORS si elle souhaite poursuivre ses projets dans les foyers… dans l’espoir d’une collaboration plus étroite à l’avenir.

Eléonore Zermatten, responsable de UNA.

Un don loin d’être unilatéral

Joan Laissue est étudiant en philosophie et anthropologie sociale. Il dispense des cours de français oral à UNA. Pour le bénévole, cet engagement n’est pas un don unilatéral, mais plutôt un partage de connaissances culturelles dans lequel il trouve son compte. Pour lui, ces moments d’échanges dépassent le but pédagogique formel d’un cours traditionnel. « L’objectif est avant tout de créer du lien social. Les cours de français ne sont qu’un service supplémentaire qui s’intègrent dans cette lignée ! Synthétiquement, on peut dire qu’on crée un point d’ancrage de façon linéaire pour elleux, sans que cela soit administratif ou au travers d’institutions étatiques ». Du débat aux activités théâtrales, sans oublier la grammaire, la barrière de la timidité se brise peu à peu au travers du dialogue. Le jeune homme est convaincu que la langue n’est pas une barrière si impénétrable qu’elle n’y paraît pour communiquer. De son expérience, ce n’est pas là le problème majeur rencontré par les apprenant·e·s : « Parler de barrière sociale par incompréhension de la langue en Suisse est insuffisant. Certaines personnes qui pratiquent un français plus que correct continuent à éprouver des difficultés d’intégration. La difficulté qui revient le plus est celle de s’en- raciner dans le tissu social suisse, très hermétique. »

Le saviez-vous ? La différence entre un·e migrant·e, un·e réfugié·e et un·e demandeur·euse d’asile

L’Unesco définit un migrant comme une « personne qui vit de façon temporaire ou permanente dans un pays dans lequel elle n’est pas née » et « qui a acquis d’importants liens sociaux avec ce pays ». Le ou la migrant.e peut être considéré.e comme légal.e ou illégal.e. Sa migration est durable ou temporaire, mari- time ou terrestre.

La convention de Genève (1951) définit un réfugié comme une personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ».

Un demandeur d’asile est un.e réfugié.e qui n’a pas encore obtenu ce statut de la part du pays dans lequel il ou elle souhaite s’établir.

Pour en savoir plus sur les projets de Caritas Suisse à Fribourg, visitez la rubrique Asile et Migration de caritas.ch.

Tu es intéréssé·e à rejoindre UNA ? Ça tombe bien ! L’association recherche un·e responsable pour les cours de langue et de renforts dans le comité d’organisation de conférence. Renseigne-toi sur leur page Facebook UNA – refugees meet students UNIFR et leur Instagram @una.unifr.