Expo photo | New York, 1965. Un hôtel bon marché. Une façade ordinaire. Quoi de plus ennuyeux? Sauf qu’à l’intérieur, des dizaines d’artistes et doux rêveurs. Retour sur les photographies du journaliste Yves Debraine dans cet endroit atypique – qui abrita notamment Tinguely et de Saint Phalle.
La nouvelle exposition temporaire de l’Espace Jean Tinguely-Niki de Saint Phalle nous dévoile une période méconnue de la vie des deux artistes. Contre le mur du fond de la vaste et unique pièce de ce musée, nous découvrons les photographies d’Yves Debraine (1925-2011). Elles nous plongent au beau milieu de la vie trépidante d’une flopée d’artistes dans un hôtel new-yorkais. Parmi eux, forcément, se trouvent Jean et Niki. C’est une époque expérimentale pour le couple d’artistes. Eux et certains de leurs amis – tous des « nouveaux réalistes » venus d’Europe – ont établi leurs quartiers au Chelsea, avec l’espoir fou de conquérir le monde de l’art américain.
Et l’expérimentation n’est pas présente que de leur côté, puisque le journaliste Yves Debraine utilise un accessoire novateur: l’objectif fisheye. Spoiler : ce modèle original à effet loupe n’est pas la dernière invention d’Instagram. Il existait déjà il y a plus d’un demi-siècle ! Sa particularité est d’avoir une forme bombée – tel un œil de poisson, vous avez vu juste – et de couvrir ainsi un angle de champ de cent huitante degrés. Alors correspondant aux Etats-Unis, le photographe lausannois prend plaisir à le tester en venant fourrer son nez dans les chambres des créateurs.
Au fil des clichés, nous découvrons tantôt Jean Tinguely en train de faire le pitre dans le hall, Niki de Saint Phalle créant ses premières statues de femmes (les célèbres « Nanas »), ou encore Daniel Spoerri, autre plasticien suisse, poser masqué dans une pièce au désordre flagrant. Ce dernier avait même pour habitude d’ouvrir sa chambre au public pour qu’il vienne y voir ses « tableaux-pièges ».
Les tissus s’amoncèlent, la peinture dégouline, et il y a même un cheval de bois. Bref, si les constructions grinçantes de Tinguely ou les sculptures rebondies de Saint-Phalle vous inspirent, vous avez là une occasion d’en voir l’envers du décor. La trentaine de photos de Debraine nous montre des artistes en plein processus de création dans leurs chambres-ateliers chaotiques. Et en plus, souvent, ils sont drôles.
A noter également : l’étage propose des photographies un peu différentes qui capturent simplement la New York de 1965. Pris sans fisheye, ces clichés sont les témoins du quotidien d’alors au sein de Manhattan.
Plus d’infos sur le site du Musée d’Art et d’Histoire de Fribourg
Crédits photo: MAHF