Carnet de voyage d’une ville encore traumatisée par l’attaque contre Charlie Hebdo.
En voyage à Paris, il est difficile de ne pas percevoir la tension latente. La ville tente de se remettre et de continuer à vivre malgré tout. Il y aura un avant et un après Charlie Hebdo. Quelle que soit la signification que l’on donne à la fusillade du 7 janvier, on ne peut pas nier l’onde de choc qu’elle a provoquée.
Une sécurité accrue
Personne n’est invisible et à l’abri du danger. C’est sûrement la première prise de conscience qui survient après une telle attaque. On imagine le danger à des kilomètres en le regardant derrière son écran et soudain, il frappe à la porte. À Paris, la sécurité est accrue. Dans les stations de métro et les gares, des messages demandant de ne pas abandonner les valises et de signaler tout contenant suspect, tournent en boucle. La rue, elle, est gardée par des militaires et des policiers. Ils sont postés devant chaque lieu dit sensibles : synagogues, mosquées, musée Juif, ou institut du monde arabe.
En tant que touristes, à l’entrée des musées et des monuments historiques, on doit se soumettre à la fouille des sacs. Si elle a été instaurée depuis longtemps, elle s’est intensifiée. Les sacs sont scrutés et les visiteurs sont priés d’ouvrir également leur manteau. Les Parisiens ne sont pas épargnés. Les étudiants de la Sorbonne se voient contraints à des contrôles quotidiens. «Le bâtiment est classé, on doit donc montrer notre carte d’étudiant pour rentrer. Mais là, les contrôles se sont intensifiés, raconte un étudiant. Un ami voulait faire visiter la cour d’honneur à une collègue. Il a prévenu en avance le vigile et voulait bien sûr l’accompagner, mais c’était hors de question. » Les commerçants sont également touchés. Dans une boutique, une vendeuse refuse de garder momentanément le sac d’une cliente. « On ne sait jamais, avec tout ce qui se passe», lui dit-elle.
Le besoin de se souvenir
Outre que la peur que le massacre continue, le besoin de comprendre et de se souvenir sont très présents. Partout, des panneaux «Je suis Charlie» trônent dans la ville. On voit les Parisiens solidaires face à une cause : la liberté d’expression. Pour la célébrer, un livre a été publié, il reprend des citations d’écrivains. Mais ce n’est pas tout. Dans les musées, les hommages se superposent. En passant par le musée Victor Hugo on voit par exemple que les pages d’un livre ont été tournées. C’est le chapitre sur la liberté qui est mis à l’honneur dans la vitrine.
La ville, les habitants, ses médias sont ainsi sous le choc. Entre peur et souvenir, on voit partout des traces de l’événement et des tentatives de le dépasser.