Le 9 novembre 2017 restera gravé dans la tête de nombreux étudiants. Retour sur une journée qui a commencé dans la cour de Miséricorde en milieu d’après-midi pour se terminer tardivement au Centre Fries, à la suite d’une assemblée organisée par Stop la Hausse Fribourg.

« Stop la hausse, stop la hausse, stop la hausse ! » Cette formule résonne encore dans la cour de Miséricorde et les rues fribourgeoises. Jeudi 9 novembre, près de 700 étudiants et sympathisants se sont mobilisés pour exprimer leur mécontentement face à l’augmentation de la taxe semestrielle, qui passera de 655 à 835 francs. Mais c’est aussi le comportement du rectorat qui était pointé du doigt par l’AGEF, certaines de ses commissions (EquOpp et Unipoko), les fachschaften et le collectif Stop la Hausse Fribourg. Tous critiquent une décision à huis clos et sans consultation auprès des étudiants et des professeurs. Selon certains étudiants, la manifestation n’avait donc pas pour unique but de stopper la hausse, mais aussi de protester contre une politique jugée « dictatoriale » du rectorat. A l’image du slogan scandé par des manifestants : « Rectrice, dictatrice ! »

« Rectrice, dictatrice ! »

De 15h à 16h30, des discours de différents intervenants se sont enchaînés, juste en-dessous du bureau de la rectrice. Les deux co-présidents de l’AGEF, Robert Avery et Jean-Thomas Vacher, ont ouvert le bal en rappelant l’objectif de la manifestation et la nécessité d’une protestation positive et sans injures. Le Syndicat des services publics, le professeur de sciences des religions François Gauthier, Stop la Hausse et plusieurs étudiants se sont aussi exprimés à la tribune.


Prof. Gauthier au micro de La Fribune (Facebook live)

Dans la foule, des étudiants brandissaient des pancartes : « Fri for All » ; « Non à la hausse, Oui au bien commun » ; « Si vous croyez que l’éducation coûte chère, essayez l’ignorance ». Peu à peu, les manifestants ont pris confiance et ont commencé à entonner : « Stop la hausse, une uni pour tous ». Entre les interventions, les étudiants pouvaient également patienter à deux stands tenus par des bénévoles. Thé et crêpes étaient offerts.

Avant de partir défiler dans la ville, une partie des manifestants a décidé de ne pas attendre la fin des cours et d’aller chercher les étudiants directement dans les salles de cours. « Allons les chercher ! » a lancé un manifestant. Alors, la troupe a envahi les couloirs de Miséricorde 03 et 04 et les auditoires de droit. Le tambour résonnait dans le bâtiment et les chants rebondissaient sur les murs. L’action n’a pas été vue d’un bon œil par tout le monde et n’était, par ailleurs, pas prévue dans le déroulement officiel de l’AGEF. A ce propos, cet incident a généré une pluie de commentaires dans le groupe Students Fribourg 2016-2017 sur Facebook.

Puis, le convoi en direction de l’Hôtel de ville a pu démarrer. Le cortège est passé devant la BCU, puis est descendu le long de la rue de Lausanne. Alors que l’entièreté de la rue était occupée, les quelques 700 étudiant marchaient et protestaient : « Stop à la hausse, une uni pour tous ! Stop à la hausse, une uni pour tous ! » Une fois la place de l’Hôtel de ville atteinte et occupée, le caractère officiel de la manifestation se terminait.


 

L’AGEF proposait ensuite de continuer avec un barathon afin de montrer l’importance de la contribution économique des étudiants à la ville. Une partie de la foule s’est à ce moment dissipée. Mais 200 personnes environ se sont regroupées et ont repris la marche dans la rue. La destination était le Centre Fries où se tiendrait l’assemblée générale de Stop la Hausse Fribourg pour discuter de la suite des évènements.


 

PARTIE II : La première assemblée de Stop la Hausse Fribourg

Après la fin de la manifestation, quelques cent étudiants se sont retrouvés au Centre Fries pour la première assemblée générale du collectif Stop la Hausse Fribourg. Invitée par le collectif, la rectrice, Astrid Epiney, devait normalement être présente afin de commencer un dialogue direct entre les deux partis. Mais, « pour des raisons de sécurité », a communiqué le rectorat, la rectrice n’est pas venue.

La discussion était modérée par Yannick Vuillème, un membre de Stop la Hausse Fribourg. Il commence par évoquer la manifestation : « Nous n’étions que 700 sur 10’000 ! La prochaine fois, nous devons être plus ».

Stop la Hausse fait trois revendications : la suppression de la hausse des taxes semestrielles, le passage à une méthode de travail plus transparente de la part du rectorat et la création d’une délégation qui se chargera de communiquer avec le rectorat. Stop la Hausse se voit comme une entité à part de l’AGEF qui pourra discuter et agir plus directement que cette dernière, « trop lourdement encombrée par les processus administratifs et soumise à l’autorité du rectorat. » Ce nouvel espace de discussions spontané est sans hiérarchie et détaché du cadre légal de l’Université. Toutefois, la démarche de Stop la Hausse se veut collaborative avec l’AGEF.

Des étudiants de l’Université de Genève ont également pris la parole pour apporter leur soutien et donner des conseils. Premiers instigateurs du mouvement Stop la Hausse, les étudiants genevois ont pu, l’année passée, faire revenir le rectorat de leur université sur leur décision d’augmenter la taxe semestrielle de 50 francs. « Le plus important est d’être à égalité avec le rectorat. Tant que la procédure est enrouée, vous n’êtes pas à égalité, et toutes les discussions que vous avez ne servent à rien car la décision reste en vigueur. » A Genève, les étudiants ont su forcer le rectorat à suspendre leur décision d’augmentation et entretenir de véritables discussions avec lui. Stop la Hausse Fribourg se fixe ce même objectif. Pour ce faire, le collectif entend continuer la mobilisation des étudiants. D’autres manifestations seront organisées, d’autres actions seront prises.

Les discussions se feront dans le cadre de médiations proposées par Astrid Epiney et le conseiller d’Etat Jean-Pierre Siggen. Une délégation de Stop la Hausse sera prochainement invitée à donner son avis. « Voilà qui aurait dû être fait bien avant l’annonce de l’augmentation, mais mieux vaut tard que jamais, non ? », lance un étudiant.

D’autres points ont été abordés, le plus important étant celui de la solidarité. A travers la lecture d’un communiqué, l’Ecole polytechnique fédérale de Zürich (ETHZ) a insisté sur la solidarité entre les étudiants interuniversitaires. L’ETHZ, l’EPFL et l’Université de Bâle pourraient, en effet, aussi voir leur taxe semestrielle augmenter ces prochaines années. « C’est un problème national, » affirme l’ETHZ dans son communiqué. Le Syndicat des services publics, qui représente les intérêts des doctorants, a insisté, quant à lui, sur la solidarité entre les étudiants et les doctorants, les deux étant soumis à la même augmentation de taxe.

Finalement, l’assemblée a abordé la solidarité entre les professeurs et les étudiants. Le professeur François Gauthier a été applaudi pour sa prise de position publique lors de la manifestation et dans les médias à l’encontre du rectorat, s’exposant ainsi à de potentielles répercussions. Mais il n’est de loin pas le seul professeur à soutenir la cause estudiantine. Des étudiants, présents aux Conseils de Faculté des lettres, ont rapporté que des professeurs se montraient contre la hausse des taxes, et dans la Faculté des sciences, il a été question d’adresser une lettre au conseil d’Etat réclamant la suppression de l’ordonnance.

En quelques semaines seulement, Stop la Hausse a réussi à s’imposer en rassemblant nombre d’étudiants à côté des efforts déjà fournis par l’AGEF. Les membres de Stop la Hausse en sont fiers : « Le rectorat ne s’attendait sûrement pas à une telle mobilisation, étant donné le peu de temps dont on disposait. Mais nous voilà. Stop la Hausse ! »

Le collectif convoque tous les étudiants et doctorants de l’Université de Fribourg à une assemblée prévue le 21 novembre 2017 à 19h30 (numéro de salle à confirmer). Les professeurs, collégiens et toutes personnes intéressées sont également conviés.


Texte et photos: Jeremy Wright (Spectrum)

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