Bruce Benamran vient de sortir son premier livre, « Prenez le temps d’e-penser ». Mais avant de connaître la gloire des librairies, le youtubeur a d’abord réussi à remettre la science sur le devant de la rampe sur YouTube ! Rencontre.
Spectrum : Est-ce que tu peux nous en dire plus sur ton parcours ?
Bruce : A la base, j’ai fait des études pour être informaticien. Je faisais des programmes depuis que j’étais tout petit. Puis j’ai découvert les chaînes YouTube en été 2013. Comme j’avais toujours été passionné de science et de vulgarisation, j’ai regardé s’il existait des chaînes de vulgarisation scientifique en France. Or ce n’était pas le cas. Je me suis donc dit que c’était le moment de le faire. Je me suis lancé et ça a bien marché. Au début ça a pris gentiment. J’avais le temps pour faire ça et ce n’était pas contraignant. J’y prenais beaucoup de plaisir. Puis d’un coup ça s’est mis à marcher et c’est devenu un business.
Quelles sont tes sources d’inspirations ?
J’ai beaucoup de sources d’inspiration, il va y avoir des gens comme Etienne Klein, Roland Lehoucq, Hubert Reeves ou encore Brian Greene, tous de grands vulgarisateurs. Pour moi, les plus meilleurs sont Richard Feynman et Etienne Klein, du côté français. Sur le ton, je m’inspire plus de ce qu’on peut trouver chez des gens comme Alexandre Astier même si je dirais que c’est presque malgré moi. Ce n’est même pas un effet voulu, je suis tellement imprégné de cet humoriste que ça déteint sur ce que je fais.
Comment gères-tu ce succès dans le milieu des Youtubeurs ?
L’avantage, c’est que c’est quelque chose qui s’est fait très progressivement et donc que ça m’a laissé le temps de me préparer. De plus, la notoriété sur YouTube n’est pas si globale que ça. Quand je me balade dans la rue, je ne suis pas harcelé par des milliers de fans. On commence à être vu par beaucoup de gens, mais les gens ne me reconnaissent pas dans la rue et on ne gagne pas des millions. Il y a des milieux dans lesquels on devient très célèbre et très riche et ça doit être très difficile à gérer. Personnellement, je fais des millions de vues, mais quand je suis chez moi, ma boulangère s’en fout. Et ça permet de garder les pieds sur terre. En plus j’ai une femme et deux enfants et il n’y a rien de tel pour recadrer sa vie. Entre les bulletins, les devoirs ou l’école…
Est-ce que tu arrives à en vivre ?
Aujourd’hui oui ! Je ne suis pas encore serein sur l’avenir, mais je sais que la transition va se faire cet été et que je pourrais arrêter mon job d’informaticien pour me consacrer à ça. Je ne basculerai pas que sur les vidéos, mais aussi les livres et sur l’univers e-penser.
Que penses-tu de manifestations comme Polymanga ?
J’aime beaucoup les conventions. On voit de plus en plus apparaître des conventions purement vidéastes, comme Neocast. C’est très bien, mais c’est totalement différent de ce que peut proposer un Polymanga. Polymanga, c’est vraiment un rassemblement de plusieurs cultures, japonaise, vidéoludique, geek, manga, de YouTube. J’aime bien cet ensemble là et de nos jours, les conventions sont les dernières occasions de se retrouver directement avec son public.
Comment gères-tu les sources dans tes vidéos ?
En fait, je n’aime pas tellement citer mes sources ! Dès lors que je ne fais pas une thèse ou un mémoire en sciences, je n’ai pas besoin d’établir une bibliographie. Quand j’ai des sources difficiles à trouver, je les mets généralement. Je trouve beaucoup plus intéressant que les gens se renseignent par eux même. Ils sont déjà sur Internet, donc c’est assez facile pour eux d’aller creuser plus loin. Quand ce sont des infos qui sont plus compliquées, là oui ça vaut la peine. Après, il y a pas mal d’infos que je trouve dans des livres, des sites internet mais aussi via des discussions avec des scientifiques. Je trouve beaucoup plus intéressant de proposer des liens pour aller plus loin dans mes vidéos. Ma vidéo n’a pas plus de valeur que celle qu’on veut bien lui accorder. Personne n’a à me croire sur parole. J’essaie de faire mon travail le plus honnêtement possible, même s’il m’arrive parfois de me tromper et de devoir rectifier dans une autre vidéo. Je ne fais ni un cours ni une thèse. Si on regarde « C’est Pas Sorcier », ils ne citent pas Copernic pour expliquer le mouvement des planètes. Vu mon travail de vulgarisation, je trouve que c’est moins nécessaire de citer les sources.
Mon travail, c’est de rendre la science accessible à des gens qui sont intéressés mais ne veulent pas forcément faire des maths. Mine de rien, dans le monde francophone, on a la tradition des maths très abstraites. Or on perd beaucoup de monde avec ça. En France il y a cette idée qu’on ne peut pas faire de science sans faire de maths, ce qui est faux. On ne peut en faire son métier, mais ça n’empêche pas de s’y intéresser.