Cinq ans après le succès bien mérité de « La Vague », qui décrivait de façon poignante comment un professeur peut transformer une classe ordinaire en micro État fasciste, « The Philosophers » nous plonge dans une apocalypse philosophique sans précédent.
Dans un collège international de Jakarta, le professeur Zimit propose une « modeste » expérience de pensée à ses élèves: comment s’organiser lors d’une apocalypse nucléaire, sachant que l’on ne dispose que d’un bunker de dix places et qu’il y a vingt personnes à abriter?
Plongeant ses élèves dans une leçon d’éthique extrême et un utilitarisme sans concessions, le professeur de philosophie se retrouvera également confronté aux limites de son propre système de pensée et de valeurs.
Avec un synopsis aussi prenant, il est difficile de ne pas se sentir immédiatement emporté dans l’intrigue philosophique de ce film. Si une partie des scènes se déroule dans une classe de Jakarta, le spectateur est rapidement projeté dans un monde post-apocalyptique dans lequel le professeur et sa classe vont pousser leur éthique jusque dans ses derniers retranchements. La photographie de qualité rend parfaitement hommage au scénario et les scènes de débat utilitariste sous les champignons nucléaires n’en sont que plus dantesques.
Un certain malaise se fait toutefois ressentir. En effet, l’opposition classique rationalité/humanité est abondamment utilisée et la pseudo conclusion -« la rationalité est dépassée, il faut être humain »- fâche et ennuie tant elle est banale.
Pourtant, si le débat éthique s’avère un peu décevant, le scénario dévoile très vite dans une intrigue beaucoup plus subtile. Naturellement, le spectateur se met à la place des élèves et cherche les limites du monde créé par le professeur. Ce dernier intervient tout au long du film en se donnant le rôle de « maître de jeu », de joker. Petit à petit, on se rend compte que ce brave philosophe n’est pas aussi rationnel que veulent bien le faire croire ses tirades utilitaristes. Le Réel contamine graduellement le monde apocalyptique proposé par le professeur à ses élèves et les relations complexes qu’il entretient avec certains de ses élèves s’insinuent dans l’expérience, rajoutant des variables humaines savoureuses au milieu de concepts froids.
« The Philosophers » réussit l’exploit de rendre la philosophie et l’éthique attrayantes malgré une certaine faiblesse conceptuelle. Des passages plus légers évitent au film de s’enfoncer dans la lourdeur et la prétention tandis que les relations du professeur avec sa classe donnent un niveau de lecture supplémentaire plus que bienvenu à l’intrigue.
Un film à ne rater sous aucun prétexte, aussi bien pour les amoureux de la philosophie que pour ses détracteurs!
Florian Mottier