Qu’est-ce qui fait l’âme des Tziganes? Où chercher lorsqu’on veut dépasser les clichés habituels de la Gitane séductrice et du Tzigane magouilleur? La section « Diaspora » du FIFF, en laissant carte blanche à Tony Gatlif, réalisateur français aux origines tziganes, ose quelques éléments de réponse.

Gadjo Dilo, un des chefs-d’oeuvre du réalisateur, est justement de cette espèce. Le film s’ouvre sur Romain Duris et son insupportable sourire de cabotin. Perdu au fin fond de la campagne roumaine, ce Parisien cherchera avec frénésie l’interprète d’une chanson roms que son père écoutait avant de mourir.

Cette quête en fil rouge, le personnage se retrouvera mêlé à la vie trépidante d’une communauté tzigane, en butte à l’hostilité des Roumains, à la dictature de Ceausescu, aux combines de mafiosi de leur ethnie.

Mais la force du film se situe ailleurs. Dans sa musique endiablée d’une part, et surtout dans son traitement relativement réaliste de cette communauté tzigane, avec tout ce qu’elle comporte de joie, de drame, mais par dessus tout de liberté sauvage, sans concession, et d’énergie. En déplaçant la focale de l’action vers ce village, « Gadjo Dilo » joue très ironiquement des stéréotypes attachés aux Tziganes. Dès les premières minutes, on suit Romains Duris dépenaillé, se réveillant d’une cuite homérique dans un village dont il ne parle pas la langue et ne comprend pas les codes. S’ensuit toute une partie où ce « Gadjo Dilo » (étranger fou) est accusé de tous les maux dont sont habituellement accablés les gens du voyage.

Mais ce film en miroir ne pose aucune morale, et c’est bien ça qui fait toute sa force. Il laisse le spectateur rêveur, un peu abasourdi, tandis que résonnent dans ces oreilles les derniers accords mélancoliques d’un violon désaccordé…

Gadjo Dilo (1997), réalisé par Tony Gatlif, disponible en prêt à la BCU Fribourg

Crédit photographie: FIFF, « Gadjo Dilo »

Florian Mottier