Locarno a consacré une section de la catégorie « Fuori concorso » à quatre films brésiliens faisant partie des studios Tela Brilhadora. Deux d’entre eux étaient présentés hier à la Sala, au sein du festival et Julio Bressane, directeur de « Garoto » et par ailleurs membre du Jury pour le « Concorso Cineasti del presente » était présent.

Lors de cette séance, deux films ont été présentés. Le premier « O Prefeito », c’est à dire en français, « Le Maire » raconte l’histoire d’un homme qui veut révolutionner Rio et le Brésil entier, tout démolir et tout reconstruire. L’idée est intéressante, bien qu’il subsiste quelque chose de dérangeant, de décalé dans l’ambiance mais surtout dans le caractère du personnage. Le bureau de celui-ci est construit sur des ruines apparemment dans l’idée que seules les ruines inspirent la nouveauté. Le personnage, dans un délire dès le début, une excentricité absolue, construit la maquette de sa nouvelle ville de rêve avec des cailloux. Ce récit pour le moins original est entrecoupé d’images fixes en noir et blanc sonorisées censées représenter le passé du personnage et la construction de son projet idéaliste, ces images donc font un peu penser à un roman feuilleton sonore…
L’idée globale de ce film est originale mais on s’attend à quelque chose d’un peu magique, on a envie que le projet se réalise, d’imaginer ce que pourrait donner un bouleversement haussmannien dans une ville comme Rio, qui plus est au XXIe siècle. La conclusion du film s’avère donc un peu décevante.

comme une légende mystérieuse dont on ne comprend pas tout le sens

Néanmoins, le style inhabituel du récit fascine, un style qu’on retrouve dans le deuxième film, plus étrange encore et plus intéressant. « O Espelho », « Le Miroir » ne peut pas vraiment être résumé. L’idée est en fait de retraduire en images, le conte poétique brésilien de Machado de Assis, comme nous l’explique Julio Bressane après la projection du film.
L’univers du film est mystérieux et inquiétant. Un homme à la poursuite de quelque chose qui le dépasse. Il y a cette fois-ci cette magie qu’on attendait, une sorte de magie noire. C’est comme une légende mystérieuse dont on ne comprend pas tout le sens. Et c’est cela qui est intéressant.
Le style particulier de cet univers ne plaît pas à tout le monde et Bressane l’explique par le fait que ces films « ne sont pas forcément contre le public mais pas pour non plus. » Une sorte d’idée de l’art pour lui-même, le geste de création comme l’entend Nietzsche. Le but est de ne pas être dans la norme et il semble que ce but soit atteint.

Coralie Gil