La scène musicale fribourgeoise a beaucoup évolué en ce début d’automne. Les groupes Dirty Sound Magnet et Intenso, respectivement rock et rap, en sont la preuve. Ces deux formations ont sorti des albums afin de dépasser les frontières de notre canton – et même au-delà.

Dirty Sound Magnet DRDirty Sound Magnet – Musiciens qui deviennent amis

Les Dirty Sound Magnet ont débuté leur carrière musicale il y a quelques années. Leur groupe n’est pas fondé sur une histoire d’amitié mais premièrement de musique. Au début ils n’étaient que deux. Stavros Dzodzosz, guitariste et Marco Mattolini, bassiste. Peu de temps plus tard, Maxime Cosandey, le plus jeune de groupe, les a rejoint. Par manque de chanteur, le trio s’est limité au début à de la musique instrumentale. C’est seulement en 2010 qu’ils ont trouvé en Didier Coenegracht un chanteur répondant à leurs attentes.

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Ce qui se trouve derrière

Moins de deux ans plus tard, en octobre 2012 ils ont sorti leur album «What Lies Behind», pour lequel ils étaient au studio avec Bertrand Siffert, membre des Young Gods et icône du rock suisse. «Le travail avec Bertrand était très précieux et son expérience nous a beaucoup aidé. Il est arrivé avant l’enregistrement et nous a laissé faire ensuite», raconte Didier Coenegracht. Par la suite, Bertrand Siffert est revenu pour donner son avis avec des oreilles neutres et un regard extérieur.

Leur musique fait référence au rock des années 70. Le quotidien fribourgeois «La Liberté» les a ainsi comparés à «Led Zeppelin, beaucoup, et à Black Sabbath, un peu». Didier répond que c’est «à la fois gratifiant et ça nous fait extrêmement plaisir, mais d’un autre point de vue cela place la barre très haut». Bien qu’ils assument leurs références, ils tiennent néanmoins à s’en dissocier. Le groupe a notamment réfléchi à ajouter des éléments un peu plus modernes, mais a conclut que le rock des années 1970, aujourd’hui, c’est presque nouveau comme musique. Parce que les jeunes d’aujourd’hui n’ont pas grandis avec cette musique-là. Pour finir ils ont donc décidées de rester fidèles à leur son et on s’en réjouit. Leur album est en effet d’une grande qualité et est distribué, en plus de la Suisse, en Allemagne, Belgique, Autriche et aux Pays-Bas.

«Free Castle Town»

Dans «Free Castle Town», le morceau final de leur album, ils évoquent les difficultés musicales qu’un artiste subit à Fribourg. «L’acceptation ne va pas de soi et les chances de pouvoir en vivre ne sont pas grandes», dit Didier Coenegracht d’un air mitigé. Le sens de la chanson a été totalement contredit lors du vernissage de leur album à Fri-Son. Didier raconte qu’il «y avait tellement de monde qui était venu pour nous soutenir qu’on n’était pas sûrs de vraiment avoir une raison jouer ce titre». Il le dit encore avec grande satisfaction.

Intenso – Premiers pas

Intenso DR

Intenso, lui, a déjà attiré l’attention nationale au printemps. Il a en effet gagné un concours organisé par le beatmaker et producteur Yvan Peacemaker et s’est finalement retrouvé sur une chanson de son album. «C’était un grande chance pour moi, vu qu’Yvan est une personnalité du rap suisse. Par contre, je ne pense pas que ça va m’aider à percer dans la scène hip-hop», raconte Intenso, avec un petit air de regret. Yvan avait entre autre déjà travaillé avec Stress et Bastian Baker.

L’autre événement où il a pu prouver ses qualités de rappeur était lors de la première parie du groupe parisien «1995» en mi-octobre à Fri-Son. «Pour nous c’était une première de jouer devant un si grand public, même s’il y a encore des détails à améliorer dans notre show, j’en garde un souvenir sympa», avance-t-il.

Nourriture chinoise

Début octobre, Intenso à publié une mixtape (comme un album, mais en accès libre, n.d.l.r.) nommée Asian Food. «Un nom sans trop de sens», avoue-t-il, «une métaphore à la nourriture qu’on sert à nos fans affamés de musique. Par contre Asian aurait très bien pu être Mexican Food ou Italian Food».  Il y a une petite allusion à la culture asiatique, en référence au film «Le secret des poignards volants» et aux mangas qui l’intéressent depuis tout jeune.

Intenso a une forte relation musicale avec Fleo, avec lequel il travaille depuis ses débuts. Celui-ci a produit la plupart des instrumentaux (musique sur lequel un rappeur poses ses textes, n.d.l.r.). «Shady est plutôt de la génération de mon petit frère, mais il a prouvé ses qualités lors de la dernière Beat Battle à Fri-Son et depuis on travaille avec lui.»

Connections intercantonales

Sur les douze morceaux que contient «Asian Food», la moitié a été produite en collaboration avec d’autres artistes. Il y a entre autres les fribourgeois Erikson et DJ Ronfa, un veveysan nommé Enigma ou encore Williman et DJ Vincz Lee de Genève. Ces contacts ont été établis pour une bonne partie par Fleo, qui a déjà enregistré une bonne partie de ces artistes. «Avec d’autres, j’ai simplement pris contact parce que j’aime bien ce qu’ils font», ajoute Intenso. Ces collaborations sont un grand enrichissement pour la mixtape, mais jamais la place d’Intenso comme protagoniste principal n’est mise en danger.

Dans «Asian Food», le rappeur raconte ses ambitions («Grimper jusqu’en haut») ou encore les complications de la vie («Boulevard») avec une telle légèreté qu’on ne peut faire autre chose que de l’écouter scander sa prose. De plus, il déploie une telle variété de flows (manière dont un rappeur récite ses textes, n.d.l.r.) qu’on se demande si tout sort vraiment de la bouche de ce jeune étudiant de 23 ans.

Adrien Woeffray